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jeudi 4 février 2016

#BodyPositive : pas une injonction, mais une invitation, à s'aimer

Un sujet qui me tient à cœur et qu'il est primordial d'aborder, puisque je n'en suis qu'aux prémices de ce blog, lorsque l'on parle de #BodyPositivity, c'est le caractère non-injonctif de ce mouvement. Parce que c'est suffisamment compliqué comme ça de vivre dans une société qui, dès le berceau, nous explique que l'on est pas assez ceci, ou trop cela, sans qu'on en devienne encore plus perdant.e.s si en plus, on n'arrive pas à s'aimer dans des conditions pareilles.

Il y a quelques années j'ai eu cette sensation là, d'être entre les deux : consciente du bullshit ambiant au sujet de "la beauté", mais incapable pour autant de me sortir de cette bulle de toxicité. Et donc d'autant plus blessée et en difficulté. Puis, il y a environ un an, lorsque j'ai vraiment sorti la tête de l'eau et commencé à relayer de plus en plus d'articles et memes body posi sur les réseaux sociaux, plusieurs amies m'ont fait part de ce ressenti familier, qu'elles avaient elles aussi.

Il y a une dizaine de jours, suite à un débat sur Facebook concernant une série de photos de nu qui sortaient, un peu, des clichés habituels sur les représentations de "la fâââme" (The Nu Project, perfectible, oui, mais vraiment chouette et surtout toujours en cours), je me suis gentiment pris le bec avec une personne qui estimait que les femmes photographiés étaient "trop" épilées pour mériter le "label" de "naturel". Euuuh... pardon ?

Certes, il y en avait peu qui étaient poilues ou très poilues dans le lot, mais il y en avait aussi beaucoup qui ne montraient pas leurs aisselles ou pubis et quand bien même... qui nous dit que ces personnes n'ont pas fait un choix conscient et éclairé, en accord avec elles-mêmes ? Pourquoi est-ce que sous prétexte qu'on se maquille ou qu'on se rase on est forcément des moutons, des opprimé.e.s qui s'ignorent ? La binarité de la réflexion sur internet me laisse pantoise, parfois, et en particulier dans les débats au sein de ma propre "famille" féministe...

Bref, du coup, j'avais posté ça sur Facebook, en réaction.




Six jours plus tard, je vois passer le coup de gueule de L'Eau Rence sur les limites du mouvement dans mes timelines, et mon amie Diane de Sexy Soucis me l'a envoyé par message. Il parle précisément de ce que j'évoquais plus haut au sujet de mon débat sur la possibilité de se conformer aux/à certaines normes sociales sans pour autant être "une victime", ou dénu.é de réflexion, de recul, sur un sujet pourtant si profondément personnel.





Je me suis dont dit qu'il était intéressant de réagir, pour en nuancer un peu le propos, un peu plus longuement que dans mon post FB :)

Certaines formulations body positive, par excès d'enthousiasme et d'envie de bien faire et non intention de nuire évidemment, peuvent parfois sonner ou être interprétées comme des injonctions. Mais de la même manière que l'on arrive, souvent ou juste parfois, à dire merde à diktats, il convient de faire de même si vous tombez nez à nez avec ce type de propos (même si on sait tou.te.s bien à quel point parfois, ce n'est pas simple). Parce que non, le mouvement body positive n'est pas une injonction à s'aimer (on en a déjà assez comme ça, des choses oppressives à gérer...), mais une invitation à vous donner une chance pour pouvoir le faire... un jour.

Être body posi, c'est s'intéresser aux racines du mal, de nos complexes, prendre conscience des méfaits de la société de consommation et d'image, faire le tri entre les mirages et la réalité. Découvrir sa beauté, et celles des autres, en dehors de tous ces clous rouillés dont est pavée notre route quotidienne. Mais ce n'est pas pour autant qu'on doit rejeter tous les "outils", ou jouets, qu'on nous propose pour "atteindre un modèle de perfection". On en fait l'usage qui nous plait et le choix nous appartient de modifier notre corps, notre apparence. Ou de ne pas le faire. Et le jugement d'autrui à ce sujet est juste irrecevable.

Par exemple, je suis clairement pas plus près de refaire un régime de ma vie que d'abandonner ma collection de tattoos, de cesser de me tracer un énorme trait de liner tous les matins ou de revenir à une couleur de cheveux non licornesque, m'voyez ? Et pourtant, on a souvent opposé ces choix-là que j'ai faits à mes opinions body posi, mais ça n'a aucun sens... Aucun. Le principal reste simplement d'apprendre à s'écouter, se respecter, et si possible, s'amuser. C'est déjà beaucoup, et croyez-le ou non, c'est déjà un premier pas vers l'acceptation et l'amour de soi.

Donc voilà. Traitez-moi de bisounourse-vivant-au-pays-de-Oui-Oui si vous voulez hein, mais quitte à devoir "pousser" une manière de voir les choses, un mode de vie, dans mon militantisme et mes propos... je choisis les yeux fermés de le faire avec celui qui invite à se laisser une chance, parce qu'il y a déjà suffisamment d'industries et de personnalités pour promouvoir le "souffrir pour être belle" en face Et qu'on a cruellement besoin de bienveillance et de douceur, pour accepter de se dire qu'il est possible d'apprendre à vivre dans la non-détestation de soi, ou plutôt, désapprendre à se haïr.

Évidemment que ce n'est pas "une obligation". Bien sûr que c'est très difficile d'aller à contre-courant. Se déconstruire prend un temps fou, et tout le monde n'a pas l'énergie, la force ou l'envie de se lancer dans ce processus qui nécessite clairement de se faire violence pendant un temps. Mais ce n'est pas pour autant qu'on devrait cesser de diffuser des messages optimistes, bienveillants et pleins d'amour, si ? À titre personnel, je suis sûre qu'ils sont, même quand ça ne va pas ou que l'on n'est pas prêt.e à lâcher nos stratégies d'adaptation pour survivre dans cette société, une fine couche de pommade sur nos blessures et nos difficultés. Ils sont rassurants, car porteurs d'espoir, tout simplement.

Je sais de quoi je parle. Ancienne anorexique, harcelée sur mon poids depuis l'enfance par mon entourage le plus proche, il m'a fallu des années à "m'auto-botter le cul" pour arriver là où j'en suis. Et je suis loin d'avoir terminé le voyage. Mais aussi tremblants et douloureux qu'aient été mes premiers pas dans cette direction, je ne reviendrais en arrière pour rien au monde, vraiment, je peux vous l'assurer, à tou.te.s. Car j'ai trouvé bien plus dans cette redécouverte de moi-même que mon passé auto-destructeur ne l'a jamais fait. Et c'est grâce à des personnes comme The Militant Baker, et leurs messages, que j'ai trouvé le courage de me lancer.

Bien sûr qu'on n'a pas tou.te.s le même vécu, pas tou.te.s le même environnement, pas tou.te.s les mêmes problèmes, pas tou.te.s les mêmes ressentis. Et même quand "on est body positive", on a des mauvais jours. Et C'EST OKAY. J'en ai. Régulièrement. Et "les jours où ça va" (= les jours où je ne me trouve pas "dégueulasse" vis-à-vis de l'image que me renvoie le monde), "ça va" rarement durant chaque minute de la journée non plus. Mais c'est déjà un énorme progrès par rapport a il y a 10 ans, et je chéris ces quelques mètres parcourus que je ne m'imaginais jamais gravir, tant le chemin me semblait alors pentu.

Donc sachez que l'intention que je mets dans les images, les mots body posi que je poste ici ne sont qu'une suggestion amicale et sincère, pleine d'empathie, à me rejoindre sur ce chemin, ou du moins à ne pas fermer vos yeux, vos oreilles et vos cœurs à la possibilité de le faire un jour. Rien de plus. Et il en va de même pour les autres "vrais" militant.e.s body positive : celleux qui sont éclairé.e.s sur et concerné.e.s par ces questions. Promis-juré 

Bon, sur ce, je retourne inonder la toile de tendresse arc-en-ciel. Bisous !

Dessin par Laura Athayde - @ltdathayde



mardi 22 décembre 2015

Guide de survie Bodi Posi pour que les Fêtes restent Joyeuses ! (et bienveillantes)


C'est comme ça que j'avais appelé mon dernier article pour Terrafemina, à la base ;)
http://www.terrafemina.com/article/le-guide-de-survie-body-positive-pour-que-noel-reste-une-fete_a298242/1 J'aimerais le compléter par quelques lignes un peu plus personnelles ici...

( Je vais commencer par resituer un peu en plantant le décor : l'amour que je porte à ma famille est inconditionnel (ce qui confère à ce que je raconte ci-dessous son caractère d'autant plus douloureux). Et il ne m'empêche pas de critiquer ce que celle-ci a pu faire ou peut continuer de faire méchamment de travers. Du côté maternel, nous étions il y a encore quelques années, trois générations de femmes complexées constamment inquiétées par notre apparence et notre poids (je n'aborderai même pas le fait que c'est surtout "pour les hommes", du moins pas maintenant).


De mon côté, c'est allé jusqu'à l'anorexie (premier régime à 12 ans, 10 kilos perdus pendant les vacances d'été, tout le monde applaudissait, ma route était toute tracée...) pendant l'adolescence. J'ai jeté deux ans de ma vie dans la cuvette des toilettes. J'ai mis du temps à m'en remettre. Et la petite voix qui me suggère de recommencer revient régulièrement. Encore aujourd'hui.


Ma stabilisation est passée par de rares épisodes d'accalmie, et de nombreux régimes qui, au final, m'ont fait yoyoter jusqu'à atteindre in va-et-viens entre 99 et 100 kilos (je me demande souvent où j'en serais si je n'avais jamais cédé à la pression familiale étant gamine). Et ce, alors même que j'avais déjà la volonté d'être aussi body positive que les nanas qui m'inspiraient sur la toile. Passer de la théorie à la pratique, ce n'est pas évident... Aujourd'hui, j'y suis. J'ai "de mauvais jours", comme tout le monde, mais j'ai dépassé le stade où mon gros cul (et tout le reste) est "un problème à résoudre".


Depuis de nombreuses années, je vis seule en France, ma famille étant à un tiers aux États-Unis et aux deux restants en Russie. Je vais fêter le Nouvel An (mon "noël" d'athée à moi) à l'Est aussi souvent que possible. Et la joie de ce rendez-vous est malheureusement toujours aussi teintée d'angoisses. Si j'ai appris à me protéger, me défendre, à faire abstraction, l'appréhension est toujours là quant aux fêtes en famille... )


Fêtes (un peu plus) safe : mode d'emploi (pas à pas) *
*là où j'en viens au fait, à peu près

Ce "guide", en fait, je l'ai écrit autant "pour vous", que pour moi. Les solutions et astuces que j'y présente sont toutes testées-approuvées par moi-même. L'année dernière, on a même atteint le point assez cocasse (même si ça n'a pas duré longtemps) où personne ne me faisait de remarques "Bah, on n'a peur de te dire quoi que ce soit maintenant vu que tu réponds à chaque fois". LAULE.

 
J'allais pas passer à côté de l'occasion de pouvoir placer un enchaînement de gifs de RuPaul's Drag Race pour illustrer ça hein^^

Mais forte de ces petites avancées sur ma confiance en moi, ces dernières années, ces derniers mois, j'ai non seulement fait la paix avec mon corps, mais aussi décidé de ne plus "diluer ma personnalité" pour faire plaisir. Je suis excentrique et tatouée. Je suis militante féministe (entre autres), aussi bien sur le terrain que sur le net. Je poste "beaucoup trop" sur les réseaux sociaux. Je suis célibataire, je ne veux pas d'enfants. C'est tout ce qui est ma vie telle que je l'aime, mais aussi des lignes de plus sur la liste de reproches potentiels (et vite avérés, d'ailleurs^^) du cercle familial tel qu'il est. Donc chaque année, ces repas/week-ends/vacances de famille sont de nouveaux défis. Mais ce que je sais, c'est que j'en ressors toujours plus forte.

Cet article que j'ai écrit, finalement, il s'applique aussi bien aux réflexions de body shaming qu'on peut subir qu'aux remarques sur nos (non-)choix, nos opinions, nos identités, ce qu'on fait de nos vies ainsi que pour faire face aux atrocités oppressives en général que peuvent nous sortir certains proches... Tant que vous êtes bien dans vos pompes, ou que vous essayez de l'être autant que faire se peut, sans faire de mal à personne : votre ressenti, votre expérience, vos envies, vos actions sont lé-gi-times ! Vous avez le droit de vous défendre, de dire non, de dire merde. Même à votre famille. Et de laisser glisser leur toxicité, intentionnelle ou non, sur vous, jusque dans le caniveau.

 
 
(l'équivalent anglais de "la bave du crapaud n'atteint pas la blanche colombe, sauf que là, on parle d'un canard)


Je suis bien placée pour savoir que ce n'est pas évident. Du tout. Mais on peut y arriver petit à petit. Vous pouvez le faire. J'vous jure. Donc voilà, ce petit complément personnel était juste pour dire à tou.te.s celleux qui rentrent passer les fêtes auprès d'une famille au potentiel toxique, ou carrément malveillante, sur tous les sujets susmentionnés (ou qui vivent 100% du temps avec) : je pense à vous, vous pouvez le faire, je vous bisoute, je vous aime, et je vous envoie une tonne de bonnes ondes arc-en-ciel pour que vos fêtes soient joyeuses